Marisol Touraine, ministre des Affaires sociales et de la Santé : « Il faut tout faire pour protéger les plus fragiles »

Marisol Touraine, ministre des Affaires sociales et de la Santé : « Il faut tout faire pour protéger les plus fragiles »

Propos recueillis par F-X.G.
Hier, à Pointe-à-Pitre, la ministre a fait le point sur le dispositif au CHU. (Dominique Chamereau-Lamotte/France-Antilles)
Hier, à Pointe-à-Pitre, la ministre a fait le point sur le dispositif au CHU. (Dominique Chamereau-Lamotte/France-Antilles)

La ministre, après avoir passé une journée en Guadeloupe, est arrivée hier en Martinique. Elle repart ce soir.

Vous avez qualifié cette épidémie de chikungunya de majeure...
C'est une épidémie majeure qui a déjà touché plus de 100 000 personnes en Guadeloupe et en Martinique, mais dont nous maîtrisons l'évolution. Les autorités sanitaires et l'ensemble du gouvernement sont mobilisés depuis le début de cette épidémie pour faire en sorte que les structures de soins soient accessibles et puissent répondre aux besoins de la population. Face à cette épidémie majeure, ma priorité est de faire en sorte que la population se protège pour ne pas tomber malade. C'est la raison de mon voyage aux Antilles, cette semaine, pendant trois jours.
C'est votre façon de dire aux gens de ne pas s'alarmer ?
C'est une façon, d'abord, de marquer la mobilisation de l'ensemble du gouvernement, de mon ministère et des autorités sanitaires, bien sûr, mais aussi celle du ministre de l'Intérieur et de la ministre des Outre-mer, auprès de la population.
C'est ensuite une façon de dire que, même si cette épidémie est sérieuse, il n'y a pas de fatalité : chacun peut se protéger et protéger son entourage, par exemple en portant des vêtements longs et en utilisant des répulsifs, mais aussi protéger son environnement en traquant de façon inlassable les gîtes larvaires. Il y a des gestes simples à faire, à adopter, qui peuvent éviter de tomber malade ou de faire progresser la maladie. Il faut engager une vraie bataille contre ces gîtes larvaires qui permettent aux moustiques de proliférer. Il faut les traquer, mener contre eux une lutte sans merci : c'est aussi cela que je suis venue rappeler.
Il y a eu 39 décès (en comptant les décès hospitaliers et en médecine de ville). Ce chiffre mérite une explication...
Il y a eu 39 décès selon les derniers chiffres. Nous disposerons de données actualisées dans quelques jours. Toutes les personnes décédées présentaient des fragilités, souffraient d'autres maladies et étaient donc affaiblies. Il ne s'agit pas de nier l'importance de cette épidémie et je ne l'ai pas fait. Elle a un impact sanitaire réel et malheureusement, comme dans beaucoup d'épidémies, des personnes fragiles sont décédées. Mais je veux dire que je suis son évolution avec la plus grande attention. Compte tenu des données précises dont je dispose, je dis aujourd'hui qu'il ne faut pas paniquer, car la prévention fonctionne, et qu'il faut tout faire pour protéger les plus fragiles.
Vous parlez de lutte sans merci contre les gîtes larvaires. D'autres renforts pour la démoustication sont-ils prévus ?
Le gouvernement vient d'envoyer une mission d'appui de la sécurité civile pour renforcer la lutte anti-vectorielle en complément des moyens locaux déjà mis en oeuvre.
Deux équipes de seize personnes ont été déployées en Guadeloupe et en Martinique pour trois semaines. Nous avons fait appel à des jeunes, avec 100 contrats aidés, pour accroître les moyens dans ce secteur. Les collectivités locales sont elles aussi fortement mobilisées et je les en remercie.
Si les services de santé tiennent le coup en Martinique, la situation semble plus compliquée en Guadeloupe. Quelle est la situation réelle et s'il y a des manques, qu'envisagez-vous ?
Aucune tension majeure du système de santé n'est pour l'instant observée. C'est vrai aussi bien en Martinique qu'en Guadeloupe. En Guadeloupe, nous avons déjà envoyé plusieurs équipes d'urgence sanitaire en renfort, au mois de février, au mois de juin et encore au mois de juillet. Si des besoins apparaissent, d'autres renforts seront envoyés. Ils sont pré-mobilisés. Nous arrivons dans une période sensible, puisque les personnels de santé vont prendre des vacances - et c'est bien normal - et que l'épidémie continue de progresser. Je veux d'ailleurs saluer l'engagement et le travail des professionnels de santé sur place, à l'hôpital mais aussi chez les médecins libéraux. Grâce à eux, la situation est actuellement maîtrisée.
Marisol Touraine, ministre des Affaires sociales et de la Santé, est de passage en Martinique pour faire le point sur la lutte contre le chikungunya.
Marisol Touraine, ministre des Affaires sociales et de la Santé, est de passage en Martinique pour faire le point sur la lutte contre le chikungunya.
Le sénateur guyanais Jean-Etienne Antoinette a évoqué le risque d'une propagation à l'Hexagone avec les flux touristiques. Est-ce une menace sérieuse ?
À partir du moment où il y a des voyageurs, il peut y avoir des cas importés de chikungunya. Mais pour moi, l'épidémie est aux Antilles et ma préoccupation, c'est la situation de la population antillaise. Mon voyage, il est auprès de la population antillaise, des professionnels antillais, car ce sont eux qui sont confrontés à l'épidémie au quotidien et c'est donc d'abord auprès d'eux que le gouvernement est mobilisé.
Il existe un vaccin encore expérimental, restera-t-il dans les tiroirs de l'Institut Pasteur ?
La recherche française en matière de vaccin est de très haut niveau et l'institut Pasteur est très impliqué. Évidemment, nous souhaitons tous que des résultats soient atteints rapidement. Il existe, c'est vrai, un vaccin, mais qui est, comme vous le disiez, en phase expérimentale. Les efforts se poursuivent et nous espérons bien sûr qu'ils permettront de déboucher aussi vite que possible sur un vaccin effectif et efficace.
Propos recueillis par F-X.G., à Paris
Le programme de la visite
Aujourd'hui de 7h30 à 09h30 - Schoelcher
Visite de terrain des chantiers des équipes de la lutte anti vectorielle chantier n°1 : quartier de l'Enclos, rue Daniel Hubbel
- Pulvérisation d'insecticides et de sensibilisation de la population ;
- Enlèvement de VHU chantier n°2 : EHPAD de Terre-village
- Traitement d'un site prioritaire par les renforts de la DGSCGC et les pompiers de Martinique. 09h45 - 11h00 - Fort-de-France Réunion de la cellule de gestion du chikungunya 11h00 - 11h15 Signature d'une convention État-Région-ADEME sur l'enlèvement des VHU 12h30 - 14h00
Déjeuner de travail à la résidence préfectorale sur l'offre de soins avec des élus et des responsables de la santé 14h15 - 16h00
Visite au CHUM : du plateau du centre 15, des urgences, de l'unité d'infectiologie et du chantier du plateau technique 16h15 - 17h15
Visite de la maison de santé du Lamentin
Kazavie : Rencontre avec les professionnels de la santé
Bilan en Guadeloupe
- 63 000 cas évocateurs (ayant donné lieu à une consultation) depuis le mois de décembre
- 5626 cas sur la semaine du 7 juillet
- 7 décès parmi les cas hospitalisés, 6 indirectement liés au chikungunya (autre pathologie très grave existante) et un directement lié.
Bilan en Martinique
- 48 940 cas évocateurs (ayant donné lieu à une consultation) depuis le mois de décembre
- 2 740 cas sur la semaine du 7 juillet
- 13 décès hospitaliers, indirectement liés à l'infection

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